Dans les profondeurs de l'enfer blanc

Publié le 12 Juin 2007

Chap.1
Une sirène d'ambulance hurlait dans la nuit. Encore une soirée mouvementée pour l'hôpital du comté de Sacramento en Californie. Les urgences étaient déjà pleines à craquer lorsqu'on amena le corps de Mark. Il venait de recevoir une balle de revolver dans le bras.
Il avait déjà perdu beaucoup de sang, et même s’il était encore conscient, le monde extérieur lui semblait déjà lointain. Son état n’était pas critique, mais la balle était passée près d’une artère. Le médecin l'examina rapidement et le dirigea en salle d'opération. Mark entendait des pleurs et sentait l'odeur nauséabonde du désinfectant. Il se sentit englouti par le néant et ses pensées firent un bon dans le passé. Tout avait commencé il y a, à peu près 1 an.

Mark appartenait à une famille de petit bourgeois. Ils avaient déjà planifié sa vie toute entière et ce depuis sa naissance. Il voyait en lui le digne héritier des Farlow. Il eut les meilleures nounous, alla dès la maternelle dans une école privée, et il finissait de brillantes études à Haward. Ses parents prévoyaient de le marier avec une amie d'enfance, elle aussi issue d'une famille aisée. Ils avaient déjà programmé la cérémonie, acheté la maison, et engagé la nurse pour leurs futurs petits enfants. Mais pour Mark, il était de plus en plus difficile de rentrer dans ce moule un peu trop étroit pour lui.
Il avait traversé une année difficile. Le stress des examens, l’approche du mariage et la peur de décevoir sa famille l’avait entraîné dans l’univers de la drogue. Tout avait commencé par quelques cachets d’extasie lors de soirées entre étudiants. Puis, il était passé aux drogues dures comme la cocaïne. Il se sentait tellement mal dans sa peau. Son esprit était troublé, parfois il avait l’impression que le monde allait l’engloutir. Seule la drogue le soulageait mais ce n’était que pour quelques heures. Une fois les effets dissipés, il se retrouvait de nouveau face à son mal être. Il avait fini par demander de l’aide et sortait d'une cure de désintoxication.
Sonia, sa fiancée, l'avait aidé à ne plus dépendre de l'enfer de la drogue. Elle avait su trouver les mots pour lui redonner confiance et le rassurer. Il éprouvait une profonde amitié pour elle et espérait qu'avec le temps il apprendrait à l'aimer.Il s'était fait à l'idée de l'épouser mais une partie de lui détestait cet état de fait. Mais comment échapper à l'influence de sa famille, surtout lorsqu'elle n'était d'aucun réconfort et refusait qu'il puisse avoir la moindre faille. Il avait toujours eu le sentiment de se sentir étranger à sa propre vie. Cela devenait de plus en plus dur à supporter. Il avait l'impression d'être à la recherche de quelque chose dont il ignorait tout. Il espérait que ce mariage allait enfin répondre à ses attentes.
Celui-ci devait avoir lieu en septembre. Alors pendant les mois d'été, il décida de se rendre à San Francisco. En fait c'était le seul moyen qu'il avait trouvé pour fuir ses parents trop envahissants.

Il se mit à sortir pratiquement tous les soirs. Il passa ses deux mois de vacances à traîner dans toutes sortes de boîtes, aussi branchées les unes que les autres. De la drogue, il était passé à l’alcool pour s’étourdir et oublier. Dans quelques jours il serait marié à une femme formidable et il avait peur de ne pas être à la hauteur.
Ce soir là, il s'installa au bar d'une discothèque plutôt désertée par les habitués, pour ce qui devait être sa dernière nuit d'ivresse. Au bout de plusieurs verres, un jeune homme vint s'asseoir à ses côtés et briser sa solitude :
-"Je peux vous offrir un verre ?" L'homme arbora un large sourire. Mark compris rapidement que le jeune homme devait être un jeune homo, à la recherche d'un partenaire pour la nuit. Pourtant il accepta son offre plus par défi que par intérêt. Il voulait voir jusqu'où il était prêt à aller. Contrairement à ce qu'il s'attendait, ils se mirent à parler librement de sujets divers et variés. A aucun moment le jeune homme n’essaya de le draguer. Pour la première fois depuis longtemps, on ne le jugeait pas, on l'écoutait. Il finit par jeter un coup d'oeil à sa montre, et s'aperçut de l'heure tardive:
-"je suis désolé, mais il faut que je rentre chez moi.
- On ne va pas se quitter comme ça. Je sens comme un courant qui passe entre nous. Tu pourrais me donner ton numéro de téléphone et se revoir." Il posa sa main sur celle de Mark, qui la retira précipitamment. La gêne s'installa en lui. Il ne pouvait que s'en prendre à lui-même. Il avait abusé de la gentillesse de ce garçon en lui faisant espérer une marque d'affection de sa part :
-"Je suis désolé mais je crois que j'avais simplement besoin de parler à quelqu'un ce soir. Je ne suis pas gay.
- Pourtant tu t'es senti bien ce soir avec moi, n'est-ce pas ? ." Mark bredouilla quelques mots d'excuses et sorti. Une fois dans son lit, il ne réussit pas à trouver le sommeil. Il ne cessait de repenser à sa conversation avec cet inconnu. Soudain il fut soulagé de se marier.

Les préparatifs battaient leurs pleins. Toute la famille était en ébullition. Visiblement la cérémonie de mariage allait être princière. Tout ce luxe n'était que poudre aux yeux et Mark en était malade. Il aurait souhaité une réunion entre intimes, loin du protocole. Il avait trouvé refuge dans le grenier de la demeure ancestrale. Il aimait ce genre d'endroit où se trouvaient de nombreux trésors cachés. Il commença à fouiller dans les cartons entassés à la recherche de son passé. Il trouva un vieil album photos du lycée. Il s’assit dans un coin et le feuilleta. Il regrettait cette époque où l'on avait encore le droit d'être insouciant. Soudain un visage que son esprit avait inconsciemment chassé de sa mémoire remonta à la surface. Il s'agissait de son meilleur ami, Johnny. Une amitié très forte les avait unis pendant de nombreuses années, mais la mort était venue s’immiscer entre eux. Il s'était tué dans un accident de moto peu de temps avant l'examen final. Mark avait été très choqué par la perte de son ami. Il se souvint qu'après ce drame il avait commencé à descendre la pente tout doucement. Il avait été envahi par un profond désespoir. Puis il s’était plonger dans ses études à Hawards, travaillant sans relâche pour oublier. Il referma violemment le livre et descendit prendre un bain de foule.

Le grand jour était enfin arrivé. Il était au bras de sa future femme l'accompagnant vers l'autel. Ses mains étaient tremblantes et son estomac noué. Alors qu'il marchait dans l'allée d'un pas saccadé, il remarqua un jeune homme dans l'assistance. Il fut troublé par la beauté de son visage. Il se tourna vers Sonia et eut une envie folle de s'enfuir. Avant de prononcer le "oui" fatidique, il regarda une dernière fois derrière lui mais le jeune homme avait disparu. Et dans un profond soupir il répondit affirmativement à la question du prêtre.
Après la cérémonie, ils partirent en lune de miel à Tahiti. Sonia était rayonnante de bonheur. Quant à Mark, il faisait semblant. Il essayait de se persuader qu'il était heureux. Il finit même pendant un certain temps à y croire. Une fois de retour à Sacramento, il obtient un poste important dans l'entreprise que dirigeait son beau-père. Il se mit à travailler comme un forcené du matin au soir. Il rentrait de plus en plus tard, prétextant une surcharge de travail. Sonia commençait à se poser des questions sur leur union.

Pendant près d'un mois elle passa pratiquement la plupart de ses soirées seule. N'en pouvant plus elle décida d'avoir une conversation avec son mari :
-"Pourquoi m'avoir épousé, si c'est pour me fuir ? Je ne te plais plus ? Je sens ton esprit préoccupé. Tu pourrais te confier à moi, ça te soulagerait.
- Tu te trompes. Je veux seulement faire bonne impression à ton père. J'ai beaucoup de travail pour être à la hauteur.
- Je te connais bien. Tu te cherches des excuses" Il pouvait voir dans ses yeux la colère monter. Il se sentit de plus en plus mal à l'aise. Il était au pied du mur. Il ne se sentait plus le courage de continuer à lui mentir. Il l'aimait trop pour faire une chose pareille :
-"Mes sentiments pour toi sont confus. Je t'aime énormément...
- Mais pas suffisamment pour que notre mariage fonctionne. C’est bien ça ?
- Je ne pense pas pouvoir t'aimer comme tu le mérites. J'ai beau essayer de toutes mes forces, je n'y parviens pas. Je me sens vide. Je ne veux pas te faire souffrir.
- Nous pouvons toujours consulter un thérapeute. Je ne veux pas baisser les bras aussi facilement. Cela fait à peine trois mois que nous partageons notre vie, il faut mettre toutes les chances de notre coté pour réussir à passer ce cap.
- J'ai besoin de prendre du recul et de faire le point sur ma vie." La rage envahit Sonia. Elle avait mis tous ses espoirs en Mark. Elle avait fait de nombreux projet d'avenir avec lui, en particulier avoir des enfants. Comment pouvait-il l'a traiter de la sorte ? Elle avait le sentiment qu'il ne cherchait même pas à faire le moindre effort pour améliorer la situation :
-"Va-t’en si tu veux, je ne veux plus te revoir !" Elle éclata en sanglot. Mark s'en voulait de lui faire tant de mal mais il ne savait plus où il en était. Il avait l'impression d'être un enfant se retrouvant tout seul dans le noir. L'angoisse de la solitude et l'échec de son mariage lui donna une irrésistible envie de tout oublier. Le seul moyen qu'il connaissait s'était la drogue.

Après avoir lutté des heures contre ses démons, Mark se retrouva à trois heures du matin dans les toilettes d'un bar miteux. Il était à la recherche d'un dealer. Au moment où il allait prendre son sachet de cocaïne, la porte s'ouvrit dans un grand fracas. Mark aperçut un homme armé brandissant une plaque de police hurlant quelques mots. Le trafiquant projeta Mark sur le policier en tentant de s'enfuir. Dans la précipitation, il tomba au sol et s'assomma sur le carrelage. A moitié groggy, Mark senti l'homme l’aider à se relever et le conduire jusqu'à son appartement.

Chap. 2
L’homme s'approcha en lui tendant un verre d'eau :
-" Comment vous sentez-vous ? Je m'appelle Gary Collins. Inspecteur Collins.
- Je suis en état d'arrestation ? Qu'est-ce que je fais ici ? Je ne devrais pas être en prison?
- Si vous voulez, je peux vous y conduire mais j'avoue que vous m'êtes plus utile dehors.
- Je ne comprends pas ! " Mark avait la bouche pâteuse. Il avait mal au crâne à l'endroit où sa tête avait heurté le sol. L'inspecteur Collins ne ressemblait en rien à l’image du flic bedonnant et grassouillet qu’il avait en tête. Il portait une tenue très décontractée et était plutôt bel homme. Il devait avoir dans la trentaine, d’allure athlétique avec de magnifiques cheveux couleur d’ébène :
-"Dans un mois je quitte la police. Mais avant de partir j'aimerai faire un coup d'éclat. Depuis des semaines je surveille Rodriguez, un gros trafiquant de stupéfiants. Mais il est très méfiant. Je n'arrive pas à me faire admettre dans le cercle très fermé des intimes.
- Je ne vois pas en quoi je peux vous aider. Je ne touche plus à la drogue. Ce soir j'étais à bout. J'allais commettre une erreur quand vous êtes intervenu. Je ne replongerais plus, je vous le jure
- Je veux simplement que vous m'introduisiez auprès de lui. A voir votre super costume fait sur-mesure, j'imagine que vous faites partie de la haute société et Rodriguez aime naviguer parmi les nantis.
- Et si je refuse ?
- Alors je vous arrête pour possession illicite de drogue. Vous imaginez le scandale ?
- Vous ne pouvez pas faire une chose pareille." Sa tête allait exploser. Il était coincé de tous les cotés. Il y avait Sonia qui lui mettait la pression, sa famille qui l'attendait au tournant et maintenant ce flic qui lui demandait de se mettre en danger pour approcher un dealer. Il commença à avoir le souffle court, ses mains se mirent à trembler, son coeur s'affola et il fut pris de nausées. Il se précipita dans les toilettes. Gary regrettait à présent de l'avoir entraîné dans cette histoire. Il se demandait s'il tiendrait le coup pour une telle mission :
-"Vous avez besoin de quelque chose ?
- Je suis à bout. Ma vie est un fiasco ! Mon mariage prend l'eau et me voilà impliqué avec la police.
- Je veux vraiment arrêter ce type. Il a bousillé pleins de jeunes gens avec sa came. Je n'ai plus beaucoup de temps. Mais si vous refusez, je n'ai aucun moyen de vous obliger.
- Et la prison ?
- Je disais ça pour vous faire peur. Mon intervention de ce soir n'était pas légale. Je n'étais pas en service lorsque j'ai débarqué.
- J'ai besoin de réfléchir." Après avoir retrouvé un peu de couleur, Gary proposa à Mark de rester dormir sur le sofa. Celui-ci accepta, il n’avait aucune envie de rentrer chez lui. Mark s'endormit comme une masse, complètement vidé par cette soirée.

Au petit matin, il retourna dans son appartement pour prendre quelques affaires puis il irait se chercher une chambre d'hôtel. Lorsqu'elle entendit la clé dans la serrure, Sonia se sentit soulagée. Elle n'avait pas dormi de la nuit. Elle savait de quoi il était capable lorsqu'il était poussé dans ces derniers retranchements. Elle remarqua sa blessure à la tête :
-"Que t’est-il arrivé ? Tu n'as pas retouché à la drogue !
- J'ai fait une chute, c'est tout. Et non je ne me suis pas drogué.
- Je m'excuse pour hier soir.
- Non, tout est de ma faute.
- Je veux que tu restes. Je suis sûre qu'on va trouver une solution." Elle lui sourit avec tendresse et lui prit la main. C'est à cet instant qu'il sut qu'il n'avait plus rien à faire avec elle :
-"Je suis simplement venu prendre quelques affaires. Je vais me louer une chambre à l'hôtel.
- Tu décide de tout plaquer, comme ça sur un coup de tête ? ." De nouveau ses yeux exprimaient le mépris. Pour la première fois de sa vie, Mark allait agir pour lui et non pour faire plaisir à son entourage.

Après avoir réfléchi longuement, il décida d'aider Gary dans son enquête. Lorsqu’il avait fait sa cure de désintoxication, il avait apprécié le travail des personnes qui lui avaient tendu la main. Peut être était-il temps de faire un geste à son tour et de faire quelque chose de positif de sa vie. Lorsqu'il arriva à l'appartement, il trouva un Gary de très mauvaise humeur. Il devait avoir eu une journée difficile :
-"J'ai pris la décision de vous aider.
- Vous avez fait le bon choix. Nous allez rendre service à de nombreux jeunes." Ils finirent leur conversation autour d'un bon repas au restaurant. Ils mirent au point leur plan d'action. Gary semblait avoir tout prévu dans les moindres détails.

L'affaire semblait bien huilée, pourtant Mark n'était tout de même pas très rassuré
Pendant plusieurs semaines, Mark fit en sorte que Rodriguez ait confiance en lui. Il commença par lui acheter de petites quantités de drogues, puis une fois devenu un client fidèle lui proposa d’élargir sa clientèle. Le trafiquant prit ses précautions et mena sa propre enquête sur Mark. Il fut rapidement convaincu qu'il tenait là un bon filon pour se faire de l'argent facile. Mark lui proposa donc de rencontrer des acheteurs potentiels qui souhaitaient acheter de grosses quantités de drogues afin de l’écouler lors de fêtes pour gosses de riches. Rodriguez mit peu de temps à se laisser convaincre car il était loin d'imaginer qu'un petit bourgeois pouvait le doubler.

Depuis le début de leur collaboration, Gary était très impressionné par le sérieux de Mark dans cette affaire. Il lui était très reconnaissant et admiratif car sans lui, il lui aurait été impossible d’approcher ce trafiquant.L’opération touchait à son terme. Demain, Rodriguez dormirait en prison, si tout se déroulait comme prévu. Gary invita Mark à dîner dans son appartement. Ce dernier était très excité par la tournure des événements. Tout semblait si facile. Il se sentait une âme de héros. Gary essaya de le ramener sur terre en lui rappelant qu'ils avaient affaire à un homme très dangereux. Et qu’il s’agissait d’une mission à risque dont Mark s’était admirablement tiré. Celui-ci ignorait beaucoup de chose sur Gary. C’était un homme très secret. Il profita de cette soirée en tête-à-tête pour apprendre à mieux le cerner :
-"Je me demandais pourquoi tu quittais la police. Tu as l'air d'aimer tellement ce que tu fais. Et je sais que se n'est pas la peur, ni l'argent qui te motivent, alors c'est quoi?
- Je ne supportais plus le harcèlement de mes collègues suite à une fâcheuse histoire. Je ne me suis pas senti soutenu par mes supérieurs, alors je préfère partir. Et toi pourquoi n'es-tu pas au coté de ta jeune épouse au lieu de me suivre dans ce merdier." Mark se rembruni. Cette question le mettait mal à l’aise :
-"Je crois que je me suis marié pour de mauvaises raisons. J'ai voulu faire plaisir à ma famille, rentrer dans le moule. Je m'étais persuadé que nous étions fait l'un pour l'autre, mais j'avais tort. » Gary semblait plus détendu ce soir. Plus enclin à se laisser aller à la confidence.
- Et maintenant, tu sais ce que tu veux faire de ta vie après toute cette histoire?
- Pas vraiment mais je sais ce que je ne veux plus. Et toi tu n’as rien d’un retraité, que vas-tu devenir ? » Leurs regards s'accrochèrent un court instant. L’atmosphère s’était soudain chargé d’électricité. Ils avaient pas mal bu et les yeux de Gary brillaient d’un éclat particulier. Cela faisait bien longtemps qu'il ne s'était pas senti aussi bien. Finalement sa séparation d’avec Sonia était la meilleure décision qu'il avait prise ces derniers temps. Il avait l'impression de ressentir, pour Gary, la même complicité qui l'avait uni par le passé à son ami d'enfance, mort tragiquement. Cette découverte le troubla énormément. Soudain, il voulut fuir loin de cet homme qui le troublait tant. Il prit congé, prétextant un rendez-vous important. Gary fut très déconcerté et déçu, il aurait aimé pouvoir prolonger la soirée. Lui aussi avait une confession à faire, il s’était suffisamment senti en confiance pour se livrer ce soir. Mais Mark ne semblait pas encore prêt.

De retour à son hôtel il fut surpris de découvrir que Sonia l'y attendait. Elle était toujours aussi resplendissante. Un épais maquillage dissimulait pourtant mal les cernes qui se formaient sous ses yeux :
-"Je suis venue prendre de tes nouvelles. Je m'inquiète pour toi. Tu ne réponds plus à mes appels.
- Je vais très bien. Ca m'a fait énormément de bien de prendre du recul. J'ai fait le point sur ma vie. Il est temps que les choses changent pour moi." Elle se crispa. Il ne supportait pas de la voir dans cet état. Il devait aller au bout de ses résolutions :
-"Je fais sûrement partie de ces changements, n'est ce pas ?
- Oui. Je veux demander le divorce. Ensuite j'envisage de changer de voix. Je suis entrée dans les affaires pour faire plaisir à mon père. J’aimerais m’engager plus dans un travail social afin d’aider les gens en difficultés comme on l’a fait pour moi. Je crois qu'il est temps pour moi de faire mes propres choix
.- Je t'aime. On ne peut pas se quitter comme ça.
- Et puis j'ai rencontré quelqu'un avec qui je me sens bien." Il savait que ce qu'il venait de lui dire était terrible. Mais c'était la seule chose qui lui était venu à l'esprit pour qu'elle accepte de le laisser.
-"Qui est-ce ? Je la connais ?
- A quoi bon te torturer ! Je veux juste sortir d'un mariage qui n'a pas marché.
- D'accord tu l'auras ton divorce !" Elle s'enfuit à travers la nuit. Sa rancoeur était tenace. Elle n'arrivait pas croire que tout était fini. Elle avait rêvé de partager sa vie avec Mark depuis sa tendre enfance. Elle avait grandi avec l'idée de passer le reste de sa vie avec l'homme qu'elle aimait le plus au monde. Elle ne pouvait pas le laisser faire sans tenter quelque chose.

Le lendemain matin elle prit la décision de le suivre discrètement. C'est ainsi qu'elle le vit pénétrer dans un immeuble qu'elle pensait être celui de sa maîtresse. Elle monta lentement les deux étages. Son souffle lui manquait. Elle ne savait pas si elle aurait assez de courage pour aller jusqu'au bout. Arrivée devant la porte, elle respira profondément et frappa trois coups secs. Gary vint lui ouvrir. Mark l'entrevit dans l'encadrement de la porte :
-"Je n'y crois pas ! Maintenant tu m'espionnes. En fait, tu ne vaux pas mieux que ma famille. Tu veux m'empêcher de vivre ma vie !!
- Pardonne moi. J'avais besoin de savoir avec qui tu me trompais. Je ne peux pas te laisser partir sans me battre.
- Fous le camp ! Sors de ma vie." Mark était hors de lui. Gary demanda à Sonia de les laisser tranquille. Elle redescendit quatre à quatre les marches. Son mariage était bel et bien fini. Elle ne pouvait s'empêcher de se culpabiliser. Elle se dit qu'elle avait sûrement une par de responsabilité.
Mark comprit que sa colère n'était pas vraiment destinée contre Sonia mais plutôt contre lui-même :
- Je crois que j'ai été odieux avec elle depuis le début de cette histoire. Mais c'est plus fort que moi. Quand je la vois, elle me renvoie tout ce que je ne serais jamais. A force de lutter contre mes sentiments, j'en ai perdu mon âme et ma santé.
- Elle à dit que tu la trompais. Il y a un quelqu'un d'autre dans ta vie ?" Gary eut soudain l'air attristé :
- Je n’en sais rien mes sentiments sont confus. Je ne suis pas sur d’être capable d’aimer quelqu’un" Il s'arrêta net sentant qu'il empruntait un terrain glissant. Il retourna à son hôtel, laissant Gary se préparer à mettre un terme à son enquête en prenant Rodriguez en flagrant délit.

Après le départ de son ami, il eut pourtant du mal à se concentrer sur l'affaire. Il se dirigea vers sa commode et en sorti une photo. Elle le représentait lui et un collègue en uniforme. Un sourire se dessina sur ses lèvres, un sourire d'amertume :
-"Pourquoi a t'il fallu que ce soit toi qui te fasses tuer dans cette ruelle ? Tu me manques tellement." Il caressa du bout des doigts ce visage gravé pour l'éternité sur papier glacé.

Avant de se rendre à son rendez-vous, Gary reçut la visite de Sonia. Elle devait vraiment tenir à son mari pour insister aussi lourdement. Il essaya de rester poli mais il ne savait pas comment l'aider :
-"Ecoutez Madame, je ne pense pas être la meilleure personne pour résoudre vos problèmes avec Mark.
- Qui êtes-vous pour mon mari ?
- Il m'aide dans une de mes enquêtes et nous sommes devenus amis, c'est tout. Mais j'ai appris à le connaître au cours de nos entretiens. Je crois que vous devriez accepter le fait qu'il souhaite reprendre sa vie en main.
- Je ne sais pas ce que Mark vous a raconté mais vous ne connaissez rien de lui et moi.
- Je ne le connais pas depuis longtemps mais je pense que vous refusez de voir la vérité en face. Cessez donc de vous agripper à lui comme à une bouée de sauvetage. Est-ce lui que vous voulez aider ou bien vous qui avez peur de vous rendre compte que vous vous êtes trompée depuis le début ? » Elle claqua la porte. Elle en avait suffisamment entendu.

chap. 3
Mark attendait le retour de Gary dans sa chambre d'hôtel. Un sentiment d'angoisse lui nouait l'estomac. Il craignait le pire concernant la fin de la mission. Il ne voulait pas le perdre. Il avait tellement besoin de lui. Il ne savait pas pourquoi, mais tout son être vibrait par sa seule présence. Il n'avait jamais rien ressenti de pareil. Peut-être était-ce cela l'amour ?. Cette idée le fit frémir. Comment lui, un homme pouvait-il ressentir la moindre attirance pour un autre homme ? Il chassa cette idée de son esprit.

Les yeux de Mark commençaient à se fermer lorsqu'il entendit frapper à sa porte. Il se précipita à grandes enjambées. En ouvrant, il découvrit Gary avec une bouteille de champagne à la main. Ils entamèrent une danse de la joie. Après ce moment d'euphorie, ils débouchèrent la bouteille et Gary raconta le déroulement de l’embuscade. Mark ne l'écoutait qu'à moitié :
-"Si je t'ennuie, tu n'as qu'à me le dire !
- Excuses moi je pensais à autre chose. Tous ces événements me confortent dans l'idée que maintenant que Rodriguez est derrière les barreaux, nous ferions mieux de ne plus nous revoir.
- Je ne comprends pas. Je pensais que nous étions amis ?
- Je ne sais plus où j'en suis. J'éprouve pour toi des sentiments étranges et je t'avouerais que ça me fait peur.
- Alors tu préfères fuir une fois de plus ? !" Gary se leva. Il se tenait à quelques centimètres du visage de Mark :
-" Tu vois, ce soir j'ai réalisé que fuir ne résoudrait rien. J'ai cru que cette solution me conviendrait. Mais j'étais tellement fier lorsque j'ai passé les menottes à ce sale type ce soir. J’ai réalisé que je ne voulais pas quitter la police pour de mauvaises raisons. Il est temps pour moi de te dire toute la vérité." Il alla se servir une coupe de champagne. Il sortit une photo de son porte carte et la tendit à Mark. Elle le représentait en compagnie d'un autre officier de police :
-"Il s'appelait Jason. Nous étions coéquipiers et nous vivions ensemble en tant que couple. Bien sûr nous avons dû cacher notre liaison par peur des représailles. La police est un milieu de macho où il ne fait pas bon être homo. Il y a deux ans lors d'une mission de routine, Jason s'est fait descendre par un drogué. Depuis sa mort mes collègues n'ont eu de cesse de me rendre la vie impossible. Ils avaient compris les liens privilégiés qui nous unissaient. J'ai perdu toute crédibilité à leurs yeux. J'ai alors décidé de baisser les bras et de quitter la police. Je m'étais fait deux promesses mais je n'en tiendrai qu'une." Il n'avait pas osé regarder Mark dans les yeux durant tout son discours. Il craignait que sa confession ne le fasse fuir pour toujours. Mark n’avait pourtant pas bougé. Il était sensible au fait qu'un homme puisse se mettre à nu sans retenu. Il l'enviait de pouvoir être aussi franc sur ses sentiments :
-"Quels étaient tes promesses ?" Sa question encouragea Gary à poursuivre :
-"Je m'étais promis d'arrêter la personne responsable par ses actions de la mort de mon ami. Ce que j'ai fait ce soir grâce à ton aide.
- Et la promesse que tu n'a pas tenue ?
- De ne plus jamais rien ressentir pour un autre homme. Lorsque je t'ai rencontré pour la première fois, j'ai pensé que tu ne devais être qu'un sale petit junkie. Je voulais simplement me servir de toi. Mais j'ai très vite compris mon erreur. J'ai réalisé que tu étais quelqu’un de bien, de courageux et de sensible. Je crois que je suis tombé amoureux de toi.
- Comment peux-tu affirmer une chose pareille ? Ma vie est un gâchis. Je ne suis bon à rien.
- Il est temps que tu ouvres les yeux. Tu ne pourras pas fuir toute ta vie. C'est ce que j'ai compris ce soir. Je voulais fuir en quittant la police alors que j'aime mon métier et que je le fais bien." Mark pouvait sentir la douce chaleur du corps de Gary à la fois si proche et si lointain. Ce dernier glissa ses doigts entre ceux de Mark et l'attira vers lui. Ses lèvres caressèrent sa joue pour finir sa course sur sa bouche. Mark ne tenta même pas de résister. Ils restèrent un long moment enlacer à s'embrasser. Mark fut envahi par un sentiment de bien être. Toutes ses peurs semblaient si loin à présent.

Mais l'enchantement fut brisé par les cris de stupéfactions poussées par Sonia. Mark et Gary sursautèrent en la trouvant planté devant eux. Elle avait les yeux exorbités et sa bouche faisait une moue de dégoût :
-"Oh mon Dieu ! Dis-moi que ce n'est pas possible.
- Sonia je vais tout t'expliquer." Elle lui asséna de nombreux coup de poings. La rage sortait par tous les pores de sa peau. Elle se précipita vers Gary et avec une violence insoupçonnée le fit trébucher au sol :
-"Espèce de salaud ! Tu as profité du désarroi de mon mari pour l'attirer dans tes filets. Tu n'es qu'un sale pervers..." En essayant de le griffer, sa main rencontra l'arme de service de Gary. Elle s'en saisit et le mit en joue. Il réussit assez facilement se dégager et se mettre hors d'atteinte. Mark se précipita sur Sonia pour la désarmer avant qu'elle ne blesse quelqu'un.
Un coup de feu retenti, raisonnant à travers toute la pièce. Sonia était sous le choc. Quant à Mark, une mare de sang s'écoulait de son bras.

Il se réveilla dans sa chambre d'hôpital. Il avait très mal, mais il n’avait rien de bien grave. Gary se tenait à ses cotés. Il lui serra tendrement la main et lui sourit. Il n'avait plus peur à présent. Il savait que quelqu'un l'aimait et qu'à son tour il était capable d'aimer. Une nouvelle vie s'offrait à lui et il était bien décidé à la vivre pleinement.
fin

 

Rédigé par Michael

Publié dans #nouvelles gays

Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :